Le Handicap sous ordonnance

Pierre GUENNAZ

Le handicap n’a pas besoin de soins, il a besoin d’action.

Portrait croisé de Stéphanie Rist, ministre de la Santé, des Familles, de l’Autonomie et des Personnes handicapées, et de Charlotte Parmentier-Lecocq, sa ministre déléguée chargée du Handicap. Un duo entre clinique politique et réalité sociale.

Médecin avant d’être ministre, Stéphanie Rist endosse aujourd’hui le portefeuille du Handicap, ce ministère qu’on ressort souvent comme un pansement sur une plaie structurelle.


Mais cette fois, la blouse blanche a pris la place du tailleur politique.


Rhumatologue, députée Renaissance du Loiret, autrice de la loi “Rist”, elle arrive avec le sérieux de la praticienne et la prudence du soldat macroniste.

Des liens d’intérêts qui la suivent comme une ombre

Son nom avait déjà fait parler de lui en 2018, dans l’enquête PharmaPapers : 309 liens d’intérêts avec les laboratoires pharmaceutiques, pour un total de plus de 40 000 €.


Des “avantages” déclarés, donc légaux — mais dans un pays où les lobbies de la santé dictent parfois les ordonnances politiques, difficile de ne pas lever un sourcil.


Rist assume : à l’époque, dit-elle, elle exerçait la médecine, participait à des formations et des congrès.


Mais son image reste associée à ce monde pharmaceutique, où la frontière entre science et influence n’a jamais été très nette.

Une France condamnée pour son regard médical

L’Europe a déjà condamné plusieurs fois la France pour sa vision trop “médicale” du handicap : un modèle qui traite plutôt qu’il n’émancipe, qui évalue plutôt qu’il n’écoute.


Or, nommer une médecin à la tête du Handicap, c’est remettre un stéthoscope sur une question qui relève avant tout de la société.


Le symbole interroge : après des décennies de rapports, de comités et de promesses, fallait-il vraiment confier la politique du handicap à celle qui connaît si bien la salle d’examen ?

La ministre connaît ses dossiers

Pourtant, Stéphanie Rist n’arrive pas les mains vides.


Derrière sa loi de 2021, souvent résumée à une réforme hospitalière, se cachait un article discret mais essentiel : la création de la plateforme Mon Parcours Handicap, censée simplifier la vie des usagers et de leurs aidants.


Elle a aussi interrogé le gouvernement sur l’inclusion dans la fonction publique et sur la scolarisation des enfants autistes.


Pas de révolution, mais une forme de pragmatisme : celui de la praticienne qui préfère un formulaire simplifié à un discours flamboyant.

Le handicap, ministère à durée déterminée

Rist hérite d’un poste souvent traité comme un appendice politique.


Les MDPH débordent, les AESH se battent pour un salaire digne, et les associations dénoncent une politique sans vision.


La nouvelle ministre devra composer avec un budget miné par les arbitrages et un pays où l’accessibilité reste plus souvent promise qu’appliquée.


Et comme toujours, la question plane : combien de temps restera-t-elle en poste ?

Dans ce ministère, la stabilité n’est pas un mot d’ordre, c’est une utopie.

à ses côtés : Charlotte Parmentier-Lecocq, la praticienne du terrain politique

Nommée ministre déléguée chargée de l’Autonomie et des Personnes handicapées, Charlotte Parmentier-Lecocq travaille auprès de Stéphanie Rist.


Autrement dit : c’est Rist qui fixe la stratégie, mais Parmentier qui gère le quotidien.


Ancienne députée du Nord, Parmentier-Lecocq est connue pour ses travaux sur la qualité de vie au travail et les risques psychosociaux.


Elle a notamment co-signé un rapport sur la santé mentale au travail et s’est souvent exprimée sur les conditions des aidants.


Moins médiatique que sa ministre de tutelle, elle affiche une image plus sociale, plus directe - le genre de profil qui connaît les réalités locales et les difficultés des structures médico-sociales.


En somme : Stéphanie Rist est la médecin devenue stratège, à la tête du ministère complet ; Charlotte Parmentier-Lecocq, la politique du terrain, chargée de l’autonomie et du handicap, souvent en première ligne sur les dossiers concrets.

Dernière injection : le courage sera le seul traitement

La nouvelle ministre connaît la douleur, mais le mal est systémique.

L’inclusion n’attend plus de miracle : elle réclame enfin une politique à hauteur d’humain.

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